Holiday : vacance, mais aussi “jour saint”, chez le metteur en scène Jerzy Grotowski, désigne un temps suspendu, d’exception, échappant à la productivité. En abandonnant le jeu social, un groupe de participants se rend disponible à de nouvelles relations extra-quotidiennes, aussi bien qu’à un travail de révélation de soi – ce que Grotowski appelle l’acte – incluant le rapport à l’autre et à la nature.
VAUDOU_HOLIDAYS fait suite au projet Vodou-Lakay en 2019. C’est un programme de résidence, atelier et action artistique autour des arts du Vaudou*, en Creuse, du 24 juin au 5 juillet 2021. Il est orchestré par le Site de pratiques théâtrales Lavauzelle (Janaillat) et le Constance Social Club (Faux-la-Montagne)
- dans un premier temps, le groupe sera accueilli par les membres de la communauté de Faux-la-Montagne et du Plateau, qui ont organisé des moments de vie ensemble, de partage et de fête autour de temps de la vie quotidienne et extra-quotidienne (manger, soigner, mourir, célébrer…). Ce temps de vie commune de six jours est ouvert à tous, sans inscription préalable, et se déroulera à Faux-la-Montagne et ses environs. Du 23 au 30 juin (site du Constance Social Club).
- ensuite, du 1er au 4 juillet le Site de pratiques théâtrales, accueillera le groupe pour un atelier de partage de pratiques, ouvert à tous, avec 2 autres artistes/groupes qui interrogent les arts du Vaudou. Le travail sera divisé en modules qui permettront de rencontrer ensemble les pratiques artistiques du Vaudou, et individuellement d’en
3 Modules
• 1. le groupe haïtien : Marie Suze Jean-Baptiste, Marie-Carmele Mentor, Mirlande Merville, Dalia Jean, Nadilie Charles, Saintelus Candy, qui sont respectivement mambos (prêtresses), algenikon (chanteuses solistes), et tambourineurs. Ils sont issus des communautés de Jacmel et Cap-Haïtien, dont ils sont des membres dirigeants.
Préoccupés de leurs répertoires traditionnels et de leur spiritualité, mais aussi de l’épanouissement des singularités de chacun, le groupe transmet des chants, mouvements de danse, et abordent des pratiques rituelles, en guidant les participants.
• 2. Vincent Harisdo, chorégraphe béninois installé à Bordeaux, qui travaille sur le Vodùn d’Afrique de l’Ouest, accompagné des 2 artistes du projet chorégraphique “Accordée” (Nadège Ametogbe, Sandra Déjardin), qui visite les figures héroïques féminines du panthéon vaudou (résidence à Lavauzelle en juin 2021)
S’inspirant des pratiques rituelles d’Afrique de l’Ouest, Vincent Harisdo en fait une ressource pour son travail de danseur et chorégraphe, en allers retours entre la France et le Bénin. Il proposera un travail sur les 4 éléments. Les danseuses du projet “Accordée” partageront des principes de leur travail commun (préparation physique qui s’appuie notamment sur la danse africaine)
• 3. Pietro Varrasso, metteur en scène et professeur de théâtre à Liège, en Belgique, ancien collaborateur de Grotowski et connaisseur de la culture haïtienne.
Pietro Varrasso s’est inspiré de motifs rencontrés lors de rituels (la durée et le caractère répétitif des danses, l’exiguïté des lieux de rituel, la vibration spécifique de ces chants) pour mettre au point des principes de travail avec les acteurs, qu’il partagera dans une démarche de rencontre et d’expérimentation.
Déroulement
Le travail durera 7 à 8 heures par jour, sur des chants, danses, mouvements rituels, rythmes… Les participants s’engagent à suivre l’ensemble de cette expérience, en fonction bien-sûr des possibilités de chacun.
Tous les soirs, il y aura un temps de partage et de rencontres autour de formes artistiques, avec quelques expériences et invités.
Les repas seront cuisinés et pris ensemble. Pour les besoins d’hébergement, merci de nous contacter à l’avance.
Prix : 180 euros / 120 euros en tarif réduit.
Inscriptions, informations : vaudou_holidays@lavauzelle.org
*Le Vaudou haïtien
La pratique traditionnelle des arts vivants et rituels Vaudou, ou Vodou, ou Võdù, trouve son origine en Afrique de l’Ouest. Transposée à son arrivée dans les Caraïbes, du fait de la traite esclavagiste, elle devient en Haïti une ressource pour le peuple, permettant de préserver un espace hors de la société où peut se vivre la relation au monde des ancêtres, un espace où se régénère leur vie communautaire. C’est un espace où les individus s’accomplissent. Paradoxalement, mis “hors d’eux-mêmes” par la fameuse possession des esprits, les célébrants manifestent en même temps leur singularité propre, profonde, en lien très intense avec la communauté.
Le vodou haïtien joue un rôle économique, social, politique et subversif. Syncrétisme des cultures d’Afrique, amérindiennes et européennes, devenu tradition à part entière, le vodou haïtien et ses références guerrières ont servi de socle idéologique à la révolte des esclaves déportés sur l’Île d’Hispaniola – aujourd’hui République Dominicaine et Haïti. Le vodou œuvre à la transformation sociale, car il est subversif.
Fabrice Nicot et Stéphane Poliakov, université Paris 8
L’art de la danse Võdù est un langage, et ce langage s’appuie sur le concept de la transformation et de la métamorphose, qui sont les clés de la compréhension des Võdùs. La danse Võdù peut traverser la barrière de la conscience pour nous permettre d’atteindre notre être pré cognitif, profondément enfoui en nous-même. Il envisage le corps comme un « vaisseau temporel » qui transporte l’âme de nos ancêtres du passé vers le futur, et il nous encourage à convier ceux-ci à participer à notre danse présente. La danse Võdù se caractérise par l’effacement du caractère, la différenciation entre le naturel et le neutre. Le passage par le neutre est à la base du processus de transformation de l’artiste, celle qui lui permettra ensuite de faire jaillir toutes sortes de créatures cachées en lui.
Vincent Harisdo, chorégraphe
Ce projet s’inscrit dans le cadre du projet de recherche Les arts vivants du vodou haïtien. Processus de transmission, filiations grotowskiennes et anthropologie (dir. Stéphane Poliakov et Fabrice Nicot) de l’EUR ArTeC et de la Maison des Sciences de l’Homme Paris Nord avec l’Université Paris 8, l’Université Paris Nanterre, l’Université d’État d’Haïti (UEH) et l’Institut Grotowski. Il est construit en coopération avec le Site de pratiques théâtrales Lavauzelle et Faux la Montagne (Creuse), la DRAC Nouvelle Aquitaine, les Lakous Madame Nerval et Legphibao (Haïti), les Cours Florent (Paris), Univers scène théâtre de l’Epi d’Or, ACC, le Centre de recherche laboratoire-spectacle, FOKAL, l’Ambassade de France en Haïti, et l’Ambassade d’Haïti en France.